Escapade nocturne

Marisa se promenait dans les rues d’Oxford, les activités du conseil d’oblation devenaient de plus en plus importantes et il lui fallait sans cesse trouver de nouveaux enfants. La lune était déjà haute et les rues peu éclairées la cachaient des quelques regards collés aux fenêtres. Sur son épaule, Oezifon lançait des regards dans tous les sens à la recherche d’un enfant errant. Cachée dans l’ombre, Marisa était à l’affût du moindre bruit, à la fois parce qu’elle ne voulait pas être vue, à la fois parce qu’elle cherchait une nouvelle proie.
Cela faisait plus d’une heure qu’elle marchait sans avoir croisé âme qui vive. Elle commençait à sentir la colère monter en elle, jamais elle n’avait effectué de recherche aussi infructueuse, elle trouvait toujours se qu’elle cherchait. Ces rues désertes se présentaient comme un obstacle insurmontable, une véritable défaite.
Cependant elle refusait de s’avouer vaincue, elle marcha encore une heure. Épuisée, s’arrêta, ferma les yeux et inspira profondément. Elle était sur le point d’abandonner lorsqu’elle entendit une petite voix lui demander un morceau de pain…

Zalyk se tenait caché dans un coin de mur, derrière la jeune femme.
Campé sur ses deux pieds, le regard farouche, il dévisageait la femme.
C'était surement elle.
Sur son épaule, Lenethys se transforma en souris blanche et s'enfouit dans le col du petit garçon.
Il continua de dévisager Marisa.
Et la petite fille qui se tenait devant elle.

Lenethys, regardes le singe !

La souris leva son museau et regarda le daemon de la jeune femme qui parlait à présent avec la petite gitane qui, suivant à la lettre le plan de Zalyk, demandait à Marisa du pain ou de la nourriture..

Oui, c'est un singe, et alors ?
- Et alors, tu as vu son air abattu qui est devenu joyeux, presque excité, quand Leila a parlé ? C'est elle, c'est sûr. Maintenant, il ne reste plus qu'à se faire attraper et à faire en sorte que Leila puisse partir !

Tous deux avaient parlé en un chuchotement imperceptible. Zalyk se leva.

Moi, j'ai du pain !

Il s'avanca, adoptant une attitude confiante. On lui avait dit de mener une vie de diable à une certaine Marisa Coulter. Et c'est ce qu'il comptait bien faire, jusqu'au bout.
Il sortit de sa poche un morceau de pain blanc et le tendit à Leila qui, le remerciant du regard ( Diable, qu'elle jouait bien son rôle, songea Zalyk ), partit en courant, grignotant le pain.
Zalyk se tourna et regarda Marisa. Ses yeux se firent suppliants et pitoyables.

Moi, j'voudrais bien manger. Mais j'avais que c'bout de pain. 'lors 'm'suis dit qu'elle en avait plus besoin que moi, pas vrai ? Mais j'fais comment, moi, pour manger, maint'nant ?

Marisa dévisagea le garçon qui se tenait devant elle, et elle se dit que s’il avait faim, c’est particulièrement stupide de sa part d’avoir donné son unique morceau de pain. Elle le regarda des pieds à la tête tandis que le singe doré observait le petit dæmon souris. Marisa se pencha légèrement vers le garçon.

« Comment t’appel-tu? »

Il murmura son nom, visiblement gêné qu’elle le lui demande. Elle sourit gentiment.

« C’est très généreux ce que tu as fait tout à l’heure. Mais ou sont tes parents? Ils ne s’occupent pas de toi? Ils ne te nourrissent pas? »

Zalyk ne répondit pas, il semblait ne pas savoir quoi dire. Marisa laissa passé cinq minutes sans qu’il ne prononce un seul mot. « Alors il a faim… » pensa-t-elle. Elle échangea un regard lourd de sens avec Oezifon.

« Dis moi Zalyk, quel age as-tu? Est-ce la forme définitif de ton dæmon ? »

Zalyk leva la tête, plongeant ses yeux à présent clairs et innocents grace à quelques minutes de concentration dans ceux, froids et observateurs, de Marisa.

- J'ai 10 ans, m'dame ... Pis mon daemon y'change souvent d'forme ...

Lenethys devint un merle noir, s'envola, puis devint hermine, et tomba sur l'épaule du petit garçon. Il en faisait juste assez. Juste assez pour faire croire qu'il n'était qu'un mendiant vantard

- Z'etes une enfourneuse, pas vrai ?

Marisa sourit, surprise par la question posée par ce jeune garçon. Elle essaya de sonder son visage mais l’obscurité ne lui en donnait pas l’occasion. Mais après tout, si elle ne distinguait pas le visage de Zalyk, lui non plus ne pouvait pas la voir distinctement, notamment en raison de sa taille.

« Une enfourneuse? Quel horrible qualificatif, et mal approprié qui plus est, nous ne maltraitons pas les enfants. Nous emmenons des enfants pauvres qui n’ont pas de quoi se nourrir et ainsi nous nous occupons d’eux. Ils sont plus heureux une fois avec nous tu sais. Tu ne me crois pas? »

Elle avait lancé ces derniers mots comme un défi; elle avait surtout envie de s’amuser.

Zalyk leva la tête vers la jeune femme. De là ou il était, il voyait parfaitement son visage, car la lune, qui cachait le sien dans l'ombre, éclairait celui de Marisa. Il se tenait droit, presque provocateur

- Nous on vous z'apelles les z'enfourneurs ... Pis pourquoi y'reviennent pas après ? J'vous crois, moi ... Pis les enfourneurs sont pas méchants avec moi...

Il mentait sans honte. Lenethys ne le trahirait pas et son attitude était celle d'un enfant des rues, mal éduqué, qui ne savait pas trop quoi penser

- Faut dire que j'les aide, des fois.

Marisa dut s’empêché de rire pour ne pas éveiller les soupçons : si un enfant aidait le conseil d’oblation elle en aurait été la première informée. Visiblement lui aussi avait envie de s’amuser, il allait être servi. Adoptant l’expression la plus neutre possible, Marisa afficha un sourire qui ne remettait absolument pas en doute les paroles de Zalyk.

« Tu les aide? Parle moi un peu plus de ton travail, on ne m’en a pas rien dit, et je suis très curieuse. Comment es-tu payé, avec de l’argent ou simplement en nourriture? »

Marisa avait décidé d’entrer dans son jeu. « Voyons jusqu’où cela nous mènera » se dit-elle confiante. Son dæmon singe s’accrocha à son bras pour venir se placer sur son épaule, ses petits yeux noirs voyaient mieux que Marisa le visage du garçon, et surtout, ils continuaient de suivre Lenethys.

Zalyk sourit. Elle comptait le prendre à son propre jeu. Hors de question que cela fonctionne.

- En fait, j'leur montre des endroits ou c'est qu'il y a . Ils me payent pas vraiment, faut dire qu'ils ont pas trop le temps ...

Il se rapprocha légèrement

Vous m'croyez pas, pas vrai ?

Emma' avait vu un des gitans partir. La nuit, dans les rues d'Oxford , n'était pas le meilleur moment pour faire une ballade, surtout avec les enfourneurs qui trainent un peu partout. Elle avait donc suivis la jeune fille, même si elle ne la connaissait pas, et l'avait vu parler avec la fameuse Mme Coulter dont tout le monde parlait. Elle n'avait pas compris le jeu de la jeune fille, et quand elle arriva a leur niveau, et sortit de l'ombre. Elle se dirigea vers Zalyk, ignorant Mme Coulter.

" Fait attention. Derrrière son visage d'ange se cache une envie de nous faire du mal ... "

Elle jeta un regard noir à Coulter, et regarda de nouveau Zalyk.

« Bien sur que non » pensa Marisa, mais elle se garda bien d’afficher la moindre expression.

« Non, en effet je ne crois pas qu’ils n’aient pas le temps de te payer, peut être qu’ils ne veulent pas, tout simplement. Ils profitent de toi. »

Le garçon afficha une moue boudeuse l’espace d’un court instant. « Maintenant qu’il s’est rapproché, je peux tout à fait voir son visage. Faisons comme si rien n’avait changé. » Oezifon sauta à terre mais resta près de sa jambe.

« Tu devrai réclamer un salaire, tu es jeune mais s’ils t’ont engagé c’est qu’ils te prennent au sérieux »

Elle rit intérieurement à ses propres dires « au sérieux… qu’elle idée ridicule, comment le conseil d’oblation pourrait-il prendre au sérieux un garçon des rues, et surtout, un si jeune garçon. »

« Par exemple tu peux leur échanger tes services contre un logement et au moins un repas chaud par jour, ça ne te plairai pas? »

Zalyk n’eut pas le temps de répondre car une jeune fille sortit de l’ombre pour lui parler. Marisa n’entendit pas ce qu’elle lui disait mais voyant l’expression agacée de son jeune interlocuteur, la jeune fille n’était pas au courant de son petit manège. Marisa les regarda, se demandant ce que cette nouvelle arrivante allait bien pouvoir lui raconter.

[ HS : euh, Emmanuelle ... Je suis un garçon ]
Zalyk tourna la tête vers Emmanuelle, gardant sa mine boudeuse.

- J'ai pas besoin de conseils. Pis j'vous connais pas, et j'fais pas confiance aux gens que j'connais pas, voilà !

Il se tourna vers Marisa, se raprocha encore. Il était à présent si près de la jeune femme qu'il aurait put déterminer le nom de son parfum, en gentleman qu'il était. Sa main bondit, en un éclair, invisible, même Marisa et Oezifon ne la remarquèrent pas.

- Pis de toute façon, les endroit qu'vous appelez chauds et avec de la nourriture ben c'est ceux ou on disparait, alors ...

Il fit un pas en arrière. Ses yeux devinrent malicieux. Il redevint le Zalyk si redouté du conseil d'oblation. Sa main se tendit vers le mur, crocheta le lière qui grimpait le long de la paroi, et soudain, il ne fut plus là.

[ HJ : dans un de tes messages tu as écrit " elle " ^^' ]

Emma' ne dit rien. Elle le regarda partir, et quand il disparu, elle se tourna vers Coulter.

" C'est donc vrai ... vous enlvez les enfants pour leur faire du mal... je me demande bien qu'est ce que ça vous apporte .. "

Elle prit un air de dégout, et tourna les talons.

» Escapade sur les toits [Fini]